Suivre le projet de restauration de plusieurs sites archéologiques au Soudan, piloter la communication d'un institut de recherche basé à Bangkok, coopérer avec l'ambassadeur du Mexique pour traquer les opportunités d'affaires des entreprises françaises, animer la coopération franco-russe à Moscou, autant de missions confiées à des jeunes entre 18 et 28 ans dans le cadre du volontariat international en administration (VIA). A la différence du volontariat international en entreprise (VIE), le VIA permet de vivre une expérience professionnelle à l'étranger non pas comme salarié dans une entreprise, mais comme contractuel dans une structure dépendant du Ministère des affaires étrangères ou du Ministère de l'économie et des finances, sous la tutelle des ambassades de France.

Fin 2012, 8 574 jeunes volontaires étaient en mission : 7 402 VIE et 1 172 VIA (dont 94 pour la Direction générale du Trésor, 115 pour UBIFRANCE et 963 pour le Ministère des affaires étrangères). L'âge moyen des VIA est de 26-27 ans (75% ont un bac+5), celui des VIE est de 25 ans.
(Source : JO du Sénat, juin 2013)

Porte d'entrée dans la fonction publique ?

Le volontariat international en administration (VIA) peut-il favoriser un recrutement dans la fonction publique d'Etat ? Non, l'Etat comme les deux autres versants de la fonction publique (l'hospitalière et la territoriale) recrute sur concours. Seule solution : préparer le fameux sésame. C'est le choix qu'a fait Nicolas Payelle Loridant après son VIA à l'Alliance française de São Luís au Brésil. Il a réussi le concours d'adjoint administratif de 1ère classe de chancellerie, est titularisé et travaille aujourd'hui à la Direction des Amériques et des Caraïbes du Ministère des affaires étrangères (lire son témoignage). Une orientation à laquelle réfléchit aussi Louis Duroulle, ex-VIA à l'Ambassade de France à Madagascar, mais sous certaines conditions (lire son témoignage plus bas). Quant à Gwendoline Debéthune qui a fait son VIA à Hong Kong au Centre d'études français sur la Chine contemporaine (CEFC), elle est aujourd'hui doctorante en socio-économie du développement à l'Ined (Institut national d'études démographiques) et elle se verrait bien « évoluer dans le monde de la recherche publique, pourquoi pas au CNRS ».

Les missions de VIA relevant du Ministère des affaires étrangères durent un an renouvelable une fois dans la limite de 24 mois. Profils recherchés : Droit, FLE, IEP, aide au développement, relations internationales, gestion de projets, sciences humaines, écoles d'ingénieurs, écoles de journalisme, informatique, génie/urbanisme, scientifiques... Toutes les offres sont centralisées sur le site du CIVI (Centre d'information sur le volontariat international). Inutile d'écrire directement aux ambassades. Le volontaire est payé entre 1200 à 3500 euros nets par mois selon le pays d'affectation et ses frais de voyage (aller/retour) sont pris en charge. Il bénéficie d'une couverture sociale complète et est exonéré d'impôt sur le revenu. La période de volontariat est prise en compte au titre du régime de retraite de base.

Témoignage d'un VIA

Louis Duroulle, 26 ans, chargé des relations extérieures des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) à Paris, titulaire d'une licence en droit, d'une maîtrise en science politique et d'un master 2 en Administration et gestion de la communication (Toulouse).

« J'ai surveillé pendant un an les offres VIA du site CIVI. Je ciblais plutôt les pays anglophones ayant déjà effectué un stage au Consulat général de France à Atlanta. Pendant cette période, j'ai envoyé une dizaine de candidatures et passé deux entretiens. La sélection est rude. J'étais en deuxième choix sur un VIA d'adjoint au conseiller presse à l'ambassade de France à New Dehli, mais le premier candidat ne s'est pas désisté. Alors quand ma candidature a été retenue pour le poste de chargé de communication à l'Ambassade de France à Madagascar, j'ai accepté sans trop d'hésitation, même s'il s'agit d'un pays francophone. Avec du recul, je pense que c'est ma première expérience d'un an et demi comme attaché de presse aux TAAF qui a fait la différence. Les candidats au volontariat international qui ont déjà travaillé ont souvent plus de chances de partir.

Avec mon VIA, j'ai vécu une belle expérience personnelle et professionnelle à Madagascar mais j'ai souhaité l'écourter. Les élections approchaient et la tension était palpable. Je ne voulais pas prendre le risque d'attendre que le pays explose, même si finalement la tension est retombée. Au lieu de rester un an, je suis parti au bout de 10 mois. J'ai eu l'opportunité d'être embauché sur un CDD, à nouveau aux TAAF à Paris, ce qui m'a permis de me désengager dans les règles du VIA.

Le VIA n'est pas véritablement un tremplin pour entrer dans la fonction publique, car le sésame c'est le concours. Le VIA permet de voir quelques facettes de l'administration, d'apprécier un contexte public, de connaître les codes. Personnellement, je suis attaché au service public, à l'intérêt général, j'aime agir en faveur de la collectivité. C'est pour cela que j'ai choisi de faire un VIA plutôt qu'un VIE, et que je m'interroge aujourd'hui sur l'opportunité de passer des concours de la fonction publique. Même si avec mes trois ans d'expérience professionnelle, j'ai plutôt envie de continuer à travailler...

Si je choisis la case « concours », je ciblerais en priorité ceux de la catégorie A. Les Instituts Régionaux de l'Administration (IRA) proposent notamment de belles carrières dans l'encadrement. Au même titre que le concours de secrétaire des affaires étrangères mais il faut être trilingue à l'écrit comme à l'oral, ce que je ne suis pas vraiment. Ou encore le concours d'attaché territorial mais il faut ensuite chercher son poste dans une collectivité, le plus souvent en province où les offres sont plus nombreuses, et pour l'instant, je souhaite rester à Paris. Il existe beaucoup d'autres concours, dans la fonction publique hospitalière par exemple, les concours des métiers de la Justice, etc. Mais la donnée de base reste la même : les concours c'est bien lorsqu'on les prépare à la sortie des études, quitte à y consacrer une année. Mais quand on travaille déjà, c'est un peu plus compliqué de les préparer et de les réussir.

Par contre, il est clair pour moi que je ne passerai pas de concours de catégorie C sous prétexte d'évoluer ensuite en interne. Non seulement, je prendrais la place de quelqu'un qui le mériterait plus que moi, mais surtout je serais frustré professionnellement. Avoir un Bac+5 avec un potentiel d'encadrement et se retrouver à exécuter des tâches basiques de secrétariat pendant 2 à 3 ans, c'est plutôt démotivant, avec tout le respect que j'ai pour ceux qui occupent ces postes avec sérieux et professionnalisme.

Comment peut-on passer un concours en interne dans cet état d'esprit ? Pourtant nombreuses sont les personnes ayant au minimum un bac+3 qui tentent un concours de catégorie C dont le niveau équivaut à un brevet des collèges, BEP ou CAP. Si les (sur)diplômés passent les concours théoriquement prévus pour ceux qui ne sont pas ou peu diplômés, il y a un problème non ?

Et puis réussir un concours quel que soit son niveau, c'est commencer au bas de l'échelle. Mes années d'expérience ne seraient pas prises en compte, ma rémunération serait certainement inférieure à celle d'aujourd'hui, qui reste indexée sur les grilles des agents contractuels de la fonction publique. Je pourrais postuler sur un emploi de contractuel, même si ce statut demeure un peu le « parent pauvre » de la fonction publique. Pour l'instant, je suis célibataire, je n'ai pas de famille à charge, et ce statut « précaire » ne me fait pas peur, ou du moins ne me pénalise pas encore. Ce qui ne serait pas le cas si j'avais une famille ou l'envie de devenir propriétaire.

Bref, deux options s'offrent à moi à la fin de mon CDD actuel : soit postuler sur un nouvel emploi de contractuel dans la fonction publique, soit chercher un poste dans le secteur privé, dans une agence de conseil en communication publique par exemple. J'ai encore quelques mois pour y réfléchir, mon CDD se terminant en 2015. »